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Les émissions de CO2 des véhicules neufs baissent pour la 1ère fois depuis 5 ans

selon un rapport de Transport and Environment (30/10/2020)


Solène Sureau

Ela Callorda Fossati

30/10/2020

rapportT_E

Selon un nouveau rapport publié par l’ONG européenne Transport and Environment (T&E 2020), les émissions de CO2 liées aux nouvelles voitures vendues par les constructeurs européens baissent enfin, après plusieurs années d’augmentation. Selon l’ONG, cette baisse serait à imputer directement au durcissement de la réglementation européenne en la matière, intervenu au début de cette année. 

Des émissions en hausse ces dernières années, malgré le règlement UE 

Le règlement établissant les normes de performance en matière d’émissions de CO2 pour les voitures particulières neuves et pour les véhicules utilitaires légers neufs ((UE) 2019/631) est en vigueur depuis 2008, et jusqu’en 2015, on observait une baisse des émissions moyennes des véhicules nouvellement vendus [1]. A partir de 2016, ces émissions augmentent, alors que le secteur des transports représente ¼ des émissions européennes (dont 70 % sont attribuables au transport routier) et est le seul secteur de l’économie européenne à connaître un niveau d’émissions supérieur à celui de 1990 (année de référence pour les statistiques). La hausse de ces dernières années est attribuée à la hausse des ventes de véhicules essence (qui émettent moins de polluants atmosphériques mais plus de CO2) suite au Dieselgate, mais surtout à la montée en gamme des voitures vendues, qui sont de plus en plus grandes, puissantes et lourdes (du type des SUV) (T&E 2019).

2020: le règlement fait enfin son effet

Selon T&E la baisse récente (-9 % entre 2019 et 2020) est due à l’électrification grandissante du parc automobile, poussée par la nouvelle cible entrée en vigueur le 1er janvier 2020 (les cibles étant revues tous les 5 ans), qui passe de 135 g à 95 gr de CO2 émis pendant l’utilisation par kilomètre parcouru. Tout en reconnaissant les flexibilités ou faiblesses du règlement, T&E qualifie ainsi les normes européennes d’émission de CO2 des véhicules d’ « un exemple moderne d’une excellente politique industrielle qui pousse l’industrie automobile à investir afin de fournir des technologies d’avenir zéro émission en Europe. »

« L’ajustement masse » du règlement et ses effets pervers

Au contraire, selon Tommaso Pardi de l’IDHES/CNRS et GERPISA (Pardi, 2020), les flexibilités contenues dans le règlement européen auraient poussé la marche vers un parc automobile de plus en plus gourmand en énergie, et qui n’a pas réduit son impact sur le climat ces dernières années (sauf cette année, selon le rapport T&E). En effet, une des flexibilités du règlement est « l’ajustement masse » qui fixe les limites à atteindre par les constructeurs en fonction de la masse des véhicules: au-delà d’une certaine masse (le seuil est actuellement fixé à 1379.88 kg), la cible à atteindre est plus élevée et en deçà, la cible est plus basse. Par ailleurs, ce seuil est adapté tous les 3 ans en fonction de la masse moyenne de l’ensemble du parc automobile. Ainsi, cet ajustement masse aurait favorisé un alourdissement du parc automobile, ce qui de facto rendrait la cible moins exigeante.

Quelles cibles pour après 2020?

Tommaso Pardi plaide ainsi pour une déconnection de la limite des émissions de la masse des véhicules, afin de contrecarrer la montée en gamme opérée par les constructeurs, qui semble poser de nombreux problèmes en matière climatique, de ressources, ou encore de sécurité routière (LisaCar, nd.).

L’ONG T&E plaide elle pour des cibles encore plus contraignantes pour 2025 et 2030, soulignant le danger d’une stagnation des ventes de voitures électriques dans les années à venir. Elle plaide aussi pour des cibles annuelles (plutôt que revues tous les 5 ans) pour éviter que les constructeurs n’attendent la dernière année pour baisser les émissions de leur flotte.

Le règlement UE, politique de déstabilisation du régime en place

En somme, ces analyses mettent en lumière le rôle du règlement européen dans la déstabilisation du régime en place et sa réorientation – que ce soit dans le sens de l’électrification des ventes ou de la montée en gamme de l’industrie. Le tableau d’ensemble de l’exnovation en matière de mobilité et de transport suppose d’interroger la gouvernance à l’échelle supranationale, i.e. européenne, y compris les différents objectifs qu’elle saura poursuivre (climat, préservation des ressources, qualité de l’air, emploi, etc.).

[1] Cette baisse est observable lorsque les émissions sont mesurées en laboratoire, et dans une moindre mesure lorsqu’elles sont mesurées en conditions réelles.

Sources : 

Transport & Environment (2020). Mission (almost) accomplished.

Pardi Tommaso, 2020, « Perspectives, contradictions et conséquences de l’électrification de l’industrie automobile européenne », présentation aux Journées du GERPISA (Réseau international de recherche sur l’automobile), 2/10/2020.

Pardi Tommaso, 2020, Conference paper : ‘Everything Must Change for Everything to Stay the Same? Prospects and Contradictions of the Electrification of the European Automotive Industry

IEW/PEWR/FEVR/T&E, Projet LISAcar (Lisa Car, LIght and SAfe Car)

Directorate-General for Climate Action of the European Commission, “Transport emissions”.

chantier concerné

Mobilité et transport

domaine de recherche

Transition vers la durabilité

lieu

Union européenne
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